Isabelle Baglioni-Fouillaret

Avant toute chose, qu’est-ce que la médiation dans un musée ? Est-ce une programmation, une animation, autre chose encore ?
La médiation, c’est tout ce qu’on met en place pour aider les visiteurs à comprendre, ressentir et s’approprier les œuvres ou les objets présentés. Elle rend le contenu plus simple, plus vivant, et accessible à tous, quels que soient l’âge, le parcours, la culture ou les besoins de chacun..

Dans le catalogue estival des médiations du musée où je travaille, une place importante est consacrée aux ateliers pour les enfants. Pour beaucoup d’entre eux, l’accès à la culture n’est pas une évidence : certains ne fréquentent que rarement les musées, faute d’occasion, de moyens ou simplement d’habitude. D’autres, parfois isolés durant les vacances, trouvent dans ces rendez-vous un moment de partage, un espace d’échange et de découverte.

La médiation culturelle prend alors tout son sens : à travers des activités ludiques et créatives, les enfants entrent en contact avec les œuvres, les objets, les récits liés aux collections ou à l’histoire du lieu. Ces ateliers ne se limitent pas à transmettre un savoir : ils éveillent la curiosité, développent l’imaginaire, favorisent l’expression et créent du lien.

Car la culture peut jouer un rôle essentiel dès le plus jeune âge. Elle ouvre des portes, suscite des émotions, stimule la réflexion, et surtout, elle rassemble. Même pendant les vacances, dans une ambiance détendue et joyeuse, elle continue d’agir, discrètement mais profondément, dans la construction personnelle et collective.

Un été au musée, à hauteur d’enfant

Parmi les moments marquants de ces dernières semaines, plusieurs ateliers ont été organisés pour les enfants, dont un, particulièrement émouvant, avec un IME. Grâce à la présence douce et bienveillante d’une animatrice bénévole, une petite fille prénommée Chloé, atteinte d’autisme, est sortie peu à peu de son mutisme. Un sourire échappé, un regard émerveillé devant la bibliothèque, les pages feuilletées d’un magazine… autant de gestes simples, mais chargés d’émotion, qui ont profondément touché chacun d’entre nous.

Les plus grands aussi ont eu leur moment : des adolescents ont participé à l’atelier « Lessive d’autrefois ». Une manière ludique et concrète de plonger dans le quotidien des femmes d’autrefois, de découvrir la dureté des tâches ménagères à cette époque, mais aussi de s’interroger sur nos propres habitudes. Économiser l’eau, limiter les produits chimiques, repenser nos gestes au quotidien… La mémoire devient ici un point de départ pour réfléchir à notre rapport au monde.

Ces ateliers sont bien plus que de simples activités : ce sont des fenêtres ouvertes. Des espaces où l’imaginaire des enfants et des jeunes peut s’épanouir, rêver, s’émerveiller, mais aussi apprendre à questionner le réel.

Quand la culture devient hospitalité

La médiation dans un musée doit-elle être gratuite ?

C’est une question essentielle, à la croisée des enjeux culturels, sociaux et économiques. Rendre la médiation gratuite, c’est affirmer un principe fort : la culture est un droit, pas un luxe. En offrant un accès sans barrière financière à des visites guidées, des ateliers, des rencontres ou des parcours pédagogiques, on ouvre le musée à tous, y compris à ceux qui n’osent pas franchir la porte ou qui n’en ont pas les moyens.

La gratuité de la médiation, c’est aussi un geste d’hospitalité : on invite le public à découvrir, comprendre, ressentir, s’approprier les œuvres et les histoires qu’elles portent. On ne se contente pas d’exposer, on accompagne, on transmet, on crée du lien.

Mais la médiation a un coût. Elle mobilise des professionnels, des bénévoles, des ressources, du temps. Alors qui doit payer ? L’état, les collectivités, les mécènes ? Peut-on imaginer des formes hybrides : une gratuité ciblée (enfance, publics éloignés, actions spécifiques), ou un tarif symbolique, sans exclure ?

Gratuite ou non, la médiation ne doit jamais être pensée comme un « plus », un simple supplément d’âme. Elle est au cœur de la mission d’un musée vivant et ouvert, un outil fondamental pour que la culture touche, émeuve et transforme.